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Paradis, Dante, 1321
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2022
Bronze sur papier Pergamenate.
100 x 50 cm, Paris.
Je vis aussi descendre par ses degrés
tant de splendeurs que je crus que du Ciel
chaque lumière par là se répandait.
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Et comme, selon leurs mœurs naturelles,
les corneilles s’ébrouent, au lever du jour,
pour réchauffer les plumes de leurs ailes,
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tandis que d’autres partent sans retour,
que d’autres vont là d’où elles sont parties,
et d’autres, tournant, restent en leur séjour,
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il m’apparut qu’il en était ainsi
dans ce scintillement qui de tous vint
jusqu’à ce qu’un certain point il atteignît.
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XXI, v. 31-42

Sermon sur la mort, Bossuet, 1662.
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2023
Encre noire sur papier Pergamenate.
29, 7 x 35 cm, Paris.
Jacques Bénigne Bossuet
Sermon sur la mort
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C’est une étrange faiblesse de l’esprit humain que jamais la mort ne lui soit présente, quoiqu’elle se mette en vue de tous côtés et en mille formes diverses. On n’entend dans les funérailles que des paroles d’étonnement de ce que ce mortel est mort. Chacun rappelle en son souvenir depuis quel temps il lui a parlé et de quoi le défunt l’a entretenu ; et tout d’un coup il est mort. Voilà, dit-on, ce que c’est que l’homme ! Et celui qui le dit, c’est un homme ; et cet homme ne s’applique rien, oublieux de sa destinée ! ou s’il passe dans son esprit quelque désir volage de s’y préparer, il dissipe bientôt ces noires idées ; et je puis dire, messieurs, que les mortels n’ont pas moins de soin d’ensevelir les pensées de la mort que d’enterrer les morts mêmes. (...)
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Entre toutes les passions de l’esprit humain, l’une des plus violentes, c’est le désir de savoir ; et cette curiosité fait qu’il épuise ses forces pour trouver ou quelque secret inouï dans l’ordre de la nature, ou quelque adresse inconnue dans les ouvrages de l’art, ou quelque raffinement inusité dans la conduite des affaires. Mais, parmi ces vastes désirs d’enrichir notre entendement par des connaissances nouvelles, la même chose nous arrive qu’à ceux qui, jetant bien loin leurs regards, ne remarquent pas les objets qui les environnent : je veux dire que notre esprit, s’étendant par de grands efforts sur des choses fort éloignées, et parcourant, pour ainsi dire, le ciel et la terre, passe cependant si légèrement sur ce qui se présente à lui de plus près, que nous consumons toute notre vie toujours ignorants de ce qui nous touche ; et non seulement de ce qui nous touche, mais encore de ce que nous sommes. (...)
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Ô mort, nous te rendons grâces des lumières que tu répands sur notre ignorance : toi seule nous convaincs de notre bassesse, toi seule nous fais connaître notre dignité : si l’homme s’estime trop, tu sais déprimer son orgueil ; si l’homme se méprise trop, tu sais relever son courage ; et, pour réduire toutes ses pensées à un
juste tempérament, tu lui apprends ces deux vérités qui lui ouvrent les yeux pour se bien connaître : qu’il est méprisable en tant qu’il passe ; et infiniment estimable en tant qu’il aboutit à l’éternité. Et ces deux importantes considérations feront le sujet de ce discours.
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1662

Messe des Morts
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2023
Encre noire sur Pergamenate
29,7 x 42 cm, Paris.
Confutatis
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Confutatis maledictis,
Flammis acribus addictis :
Voca me cum benedictis.
Oro supplex et acclinis,
Cor contritum quasi cinis :
Gere curam, mei finis
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Lux æterna
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Lux æterna luceat eis, Domine,
Cum sanctis tuis in aeternum :
Quia pius es.
Requiem æternam dona eis, Domine ;
Et lux perpetua luceat eis.
Requiem æternam dona eis, Domine ;
Et lux perpetua luceat eis.
Cum sanctis tuis in æternum :
Quia pius es.

Chants de l’Innocence, William Blake, 1789
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2022
Encre verte et bronze sur Pergamenate
50 x 70 cm, Paris

Les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire, 1857
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2023
Encre noire sur Pergamenate
33 x 41 cm, Paris
Le mort joyeux
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Dans une terre grasse et pleine d’escargots
Je veux creuser moi-même une fosse profonde,
Où je puisse à loisir étaler mes vieux os
Et dormir dans l’oubli comme un requin dans l’onde.
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Je hais les testaments et je hais les tombeaux ;
Plutôt que d’implorer une larme du monde,
Vivant, j’aimerais mieux inviter les corbeaux
À saigner tous les bouts de ma carcasse immonde.
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— Ô vers ! noirs compagnons sans oreille et sans yeux,
Voyez venir à vous un mort libre et joyeux ;
Philosophes viveurs, fils de la pourriture,
À travers ma ruine allez donc sans remords,
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Et dites-moi s’il est encor quelque torture
Pour ce vieux corps sans âme et mort parmi les morts ?
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1857

Also sprach Zarathustra, Friedrich Nietzsche, 1888
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2022
Diptyque. Encre noire sur papier Pegamenate
2 x 100 x 70 cm, Paris
Ainsi parlait Zarathoustra
Un livre pour tous et pour personne
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J’aime ceux qui ne savent vivre autrement que pour disparaître, car ils passent au-delà.
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J’aime les grands contempteurs, puisqu’ils sont les grands adorateurs, les flèches du désir vers l’autre rive.
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J’aime ceux qui ne cherchent pas derrière les étoiles une raison pour périr et pour s’offrir en sacrifice ; mais ceux qui se sacrifient à la terre, pour qu’un jour la terre appartienne au Surhumain.
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J’aime celui qui vit pour connaître, et qui veut connaître afin qu’un jour vive le Surhumain. Car c’est ainsi qu’il veut son propre déclin.
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J’aime celui qui travaille et invente, pour bâtir une demeure au Surhumain, pour préparer à sa venue la terre, les bêtes et les plantes : car c’est ainsi qu’il veut son propre déclin.
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J’aime celui qui aime sa vertu : car la vertu est une volonté de déclin, et une flèche de désir.
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J’aime celui qui ne réserve pour lui-même aucune goutte de son esprit, mais qui veut être tout entier l’esprit de sa vertu : car c’est ainsi qu’en esprit il traverse le pont.
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J’aime celui qui fait de sa vertu son penchant et sa destinée : car c’est ainsi qu’à cause de sa vertu il voudra vivre encore et ne plus vivre.
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J’aime celui dont l’âme se dépense, celui qui ne veut pas qu’on lui dise merci et qui ne restitue point : car il donne toujours et ne veut point se conserver.
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J’aime celui qui a honte de voir le dé tomber en sa faveur et qui demande alors : suis-je donc un faux joueur ? — car il veut périr.
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J’aime celui qui jette des paroles d’or au-devant de ses œuvres et qui tient toujours plus qu’il ne promet : car il veut son déclin.
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J’aime celui qui justifie ceux de l’avenir et qui délivre ceux du passé, car il veut que ceux d’aujourd’hui le fassent périr.
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J’aime celui qui châtie son Dieu, puisqu’il aime son Dieu : car il faut que la colère de son Dieu le fasse périr.
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J’aime celui dont l’âme est profonde, même dans la blessure, celui qu’une petite aventure peut faire périr : car ainsi volontiers il passera le pont.
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J’aime celui dont l’âme déborde, en sorte qu’il s’oublie lui-même, et que toute chose soit en lui : ainsi toutes choses deviendront son déclin.
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J’aime celui qui est libre de cœur et d’esprit : ainsi sa tête ne sert que d’entrailles à son cœur, mais son cœur l’entraîne au déclin.
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1883

Kindertotenlieder, Friedrich Rückert, 1871
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2022
Encre noire sur Pergamenate
60 x 65 cm, Paris

Le bilan de l’intelligence 1/3, Paul Valéry, 1938
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2023
Encre noire sur Pergamenate
29, 7 x 42 cm, Paris

Le bilan de l’intelligence 2/3, Paul Valéry, 1938
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2023
Encre noire sur Pergamenate
29, 7 x 42 cm, Paris

Du bist in tiefer Mitternacht, Georg Trakl, 1913
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2022
Encre noire sur papier Pergamenate
50 x 65 cm, Paris

Conférence au théâtre du Vieux Colombier, Antonin Artaud, 1947
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2022
Encre noire sur papier Pergamenate
100 x 70 cm, Paris

Lettres de Rodez, Antonin Artaud, 1943
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2022
Encre noire sur papier Pergamenate
29,7 x 42 cm, Paris

Todesfuge, Paul Celan, 1945
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2025
Encre noire et sepia sur papier Pergamenate
21 x 29,7 cm, Paris
Die Todesfuge, 1945
Paul Celan
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Schwarze Milch der Frühe wir trinken sie abends
wir trinken sie mittags und morgens wir trinken sie nachts
wir trinken und trinken
wir schaufeln ein Grab in den Lüften da liegt man nicht eng
Ein Mann wohnt im Haus der spielt mit den Schlangen der schreibt
der schreibt wenn es dunkelt nach Deutschland dein goldenes Haar Margarete
er schreibt es und tritt vor das Haus und es blitzen die Sterne er pfeift seine Rüden herbei
er pfeift seine Juden hervor läßt schaufeln ein Grab in der Erde
er befiehlt uns spielt auf nun zum Tanz
Schwarze Milch der Frühe wir trinken dich nachts
wir trinken dich morgens und mittags wir trinken dich abends
wir trinken und trinken
Ein Mann wohnt im Haus der spielt mit den Schlangen der schreibt
der schreibt wenn es dunkelt nach Deutschland dein goldenes Haar Margarete
Dein aschenes Haar Sulamith wir schaufeln ein Grab in den Lüften da liegt man nicht eng
Er ruft stecht tiefer ins Erdreich ihr einen ihr andern singet und spielt
er greift nach dem Eisen im Gurt er schwingts seine Augen sind blau
stecht tiefer die Spaten ihr einen ihr andern spielt weiter zum Tanz auf
Schwarze Milch der Frühe wir trinken dich nachts
wir trinken dich mittags und morgens wir trinken dich abends
wir trinken und trinken
ein Mann wohnt im Haus dein goldenes Haar Margarete
dein aschenes Haar Sulamith er spielt mit den Schlangen
Er ruft spielt süßer den Tod der Tod ist ein Meister aus Deutschland
er ruft streicht dunkler die Geigen dann steigt ihr als Rauch in die Luft
dann habt ihr ein Grab in den Wolken da liegt man nicht eng
Schwarze Milch der Frühe wir trinken dich nachts
wir trinken dich mittags der Tod ist ein Meister aus Deutschland
wir trinken dich abends und morgens wir trinken und trinken
der Tod ist ein Meister aus Deutschland sein Auge ist blau
er trifft dich mit bleierner Kugel er trifft dich genau
ein Mann wohnt im Haus dein goldenes Haar Margarete
er hetzt seine Rüden auf uns er schenkt uns ein Grab in der Luft
er spielt mit den Schlangen und träumet der Tod ist ein Meister aus Deutschland
dein goldenes Haar Margarete
dein aschenes Haar Sulamith